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les chemins de bruno
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16 juin 2012

11ème jour : Conques - Livinhac le Haut

     Vendredi 4 mai 2012 : Conques - Livinhac le Haut - 24 Km

 

     Étape plus longue dans l'objectif de me rapprocher de Figeac (fin "cohérente" au regard du tracé et point de "ramassage" convenu avec ma "veuve") et ce aussi tôt que possible dans l'après midi de demain.

     Etape marquée par la négociation d'emblée d'un dénivelé "significatif" pour s'extraire de la vallée du Dourdou au creux de laquelle se niche Conques, qui apparaît alors dans sa beauté compensant largement l'effort consenti.

2_vue Conques_2

     Une chapelle dédiée à Ste Foy marque l'acmé de cette montée et je passe à son niveau un long moment à observer la cité que je viens de quitter. Puis, avant de poursuivre ma progression vers ce qui m'apparait maintenant comme l'achévement indicible d'un moment particulier, j'inscris dans le registre de la chapelle (comme tant d'autres avant moi)  une brève note, sorte de synthèse des 10 jours écoulés complétée d'une intention tournée vers l'avenir.

     La progression dès lors, n'est marquée d'aucune difficulté significative et se déroule à travers des paysages verdoyants et l'agglomération de Décazeville (cité à vocation industrielle dans laquelle la laideur des constructions semble le disputer au bruit) que je franchis aussi rapidement que possible pour retrouver un environnement répondant plus à mes aspirations du jour.

9_chemin vers Decazeville_2

 

 

     Etape au final caractérisée par, outre un "vague à l'ame" lié à l'écheance qui se rapproche et que la perspective de revoir mes proches ne parvient pas à totalement juguler, la densité des contacts humains qui la jalonnent .

     Levé dès 7 heures, parmi les premiers de mon dortoir, je n'entame finalement ma journée que bien après 9 h.

     D'emblée en effet , j'étire mon petit déjeuner pris avec l'un des quinquagénaires du groupe (descendu seul) qui a appris 48 h plus tôt que sa mère a fait un AVC compliqué d'une infection pulmonaire sévère  (pronostic fonctionnel très reservé  me confie t-il); domicilié à Cannes il a prévu de remonter à Lilles dès ce jour afin de la voir et m'apparait très affecté par la situation. Nous échangeons longuement et je tente d'accompagner par une écoute empathique son cheminement sur les perspectives évolutives annoncées par l'équipe médicale en charge de sa mère.

      Puis dès la sortie de la cité , je m'arrête dans un café afin de saluer un couple côtoyé ces derniers jours (ces deux septuagénaires y attendent leur navette pour retourner au Puy en Velay);  j'en profite pour recharger la batterie de mon appareil photo en prenant un café. Rapidement le gérant me confie  s'être retiré en ce lieu un peu isolé pour échapper à la vie plus que trépidante qu'il avait à Paris comme chef machiniste sur des grosses productions alors qu'il était initialement guide de haute montagne (!?). J'écoute avec intêret ce personnage, au verbe haut, raconter avec un regard amusé et parfois très critique ses années dans ce monde de la production cinématographique.

     Je débute ainsi ma progression après 9h30 et, après avoir fait un bref arrêt dans une chapelle dédiée à St Roch, me retrouve avec d'autres pèlerins aux abord de la Chapelle surplombant la vallée.

 

3_vitrail St Roch

 

      Parmi ces derniers, je retrouve Christina (une jeune allemande vue à plusieurs reprises depuis une semaine et qui voyagait jusqu'alors avec son ami)  seule aujourd'hui en compagnie d'un quinquagénaire avec lequel j'échange rapidement un regard devant l'attitude parfaitement irrespectueuse du lieu d'un groupe de "gueulards". Nous les laissons s'éloigner et, le calme revenu, nous nous présentons en reprenant tranquillement notre marche. J'apprends ainsi qu'il s'appele Jean Claude et chemine délibérément en arrière d'un groupe de relations qui lui laisse des "balises" sur le Chemin. Christina, pour sa part m'explique qu'elle vient de terminer ses études aux Pays Bas ("développement international" - elle parle 4 langues) et à prévu de marcher aussi loin que possible vers St Jacques en s'arrêtant travailler dans les fermes maraîchères bio du sud de la France. Cheminant jusqu'à hier avec son ami rentré terminer son année universitaire elle a rencontré Jean Claude en début d'étape et chemine avec lui depuis lors. Elle confie rapidement une sorte de "blues" lié à l'absence.

     Après quelques kilomètres de cheminement partagé, je quitte ce binome et poursuis seul ma progression (je les retrouverai en fin d'après midi après Décazeville) pour me retrouver  devant une grange marquée d'une coquille qui s'avère être un accueil donativo.

  6_ accueil pèlerin donativo_secteur Prayssac

     J'y déjeune donc de saucisse sèche et de cabecou trouvés dans un garde manger suspendu à une poutre, le tout arrosé d'un vin de pays. L'hospitalier qui arrive à la fin de ce repas, s'avère être un  jeune agriculteur d'une trentaine d'année ancien pèlerin avec lequel j'échange, jusqu'à l'arrivée d'un groupe de marcheurs, sur les rigueurs du climat et surtout au sujet de son expérience du Chemin réalisé 2 ans plus tôt. Je quitte avec une pointe de regret cette halte accompagné du chant des pélerins qu'entonne  cet hospitalier écoutez içi.

     Les 10 kilomètres suivant, effectués sans rencontrer âme qui vive, sont sans particularité et je rejoins mes compagnons de ce matin à la sortie de Décazeville.

     Arrivés dans le bourg de St Roch nous nous arrêtons auprès d'un habitant pour lui demander une précision sur l'itinéraire; celui-ci est en fait le curé à la retraite de la paroisse et nous propose de nous faire visiter son ancienne église. L'interieur a fait l'objet d'une récente rénovation et nous apprenons ainsi à l'observation d'un pilier que nous ne sommes plus qu'à 1300 kilomètres du terme de cette voie.

 

10_église St Roch

 

 

11_église St Roch_détail

 

tampon église St Roch

      Nous parcourons ensuite rapidement les derniers kilomètres poursuivis puis finalement rattrapés par un orage que l'ancien curé et une de ses paroissiennes nous avez pronostiqué. Nous nous séparons ainsi rapidement sous une pluie battante, Christina et Jean-Claude ayant un hébergement prévu au gîte municipal dans le centre du bourg tandis que la chambre d'hote où j'ai retenu est situé en périphérie du bourg.

     Cet hébergement est situé  au milieu des champs de maraîchers et j'y suis accueilli par une dame d'une cinquantaine d'année qui m'apparait "mal à l'aise". Apprenant que je serais son seul hote ce soir, je prends la décison de repartir dans le bourg (= 2 kilomètres AR) afin de participer à l'accueil des pèlerins organisé par la paroisse. J'y passe un moment à découvrir un nouveau groupe de pèlerins, la totalité de ceux que j'avais côtoyé jusqu'ici s'étant arrêtée à Conques, parmi lequel figure le chanteur corse d'hier soir dans l'abbatial qui se révèle un fin calligraphe; il prépare un sympathique mot que nous signons tous pour les archives des 2 paroissiennes qui nous accueillent avec boissons chaudes et gateaux maison.

     Après ce moment de convivialité et partage d'expériences, je me rends à l'église où je m'attarde particulièrement devant un vitrail et la chaire.

 

15_église Livinhac le haut_vitrail_4_St Adrien

 

16_église Livinhac le haut_détail chaire_1

 

 

     Après ce moment d'arrêt dans la quiétude de l'édifice, je repars, sous un soleil déclinant, vers mon hébergement et comme prévu rejoins mon hôtesse pour le dîner.

     Celui-ci débute dans une atmosphère très discrètement "pesante" dont j'ai après quelques minutes l'explication : nous sommes à la date anniversaire du décès 3 ans plus tôt de son mari et pour la première fois elle est sans sa famille en cette circonstance. Dès lors, j'imagine soulagée d'avoir pu lâcher la chose, mon hotesse s'affaire à préparer le repas (soupe à l'oignon, omelette à l'oseille notamment) en livrant successivement les difficultés pour le règlement de la succession de son mari dont son fils a repris l'exploitation et  sa solitude. Ces choses livrées, la conversation finie par dériver vers son expérience du Chemin fait jusqu'à Moissac l'année dernière puis sa collection de cafetières anciennes entre autres sujets.

     Nous nous quittons après ce repas qui s'est finalement étiré sur près de 2 heures (sans que je n'ai vu passer le temps) dont l'atmosphère me laisse un sentiment de satisfaction d'avoir, a priori, pu alléger le poids de ce moment particulier pour mon hôtesse.

    Il me semble en regagnant ma chambre que je viens d'ajouter, avec ce temps de dialogue singulier, un autre moment "fécond" à mon itinéraire et je ne peux m'empêcher de m'interroger sur ce "hasard" qui a deux reprises aujourd'hui m'a renvoyé à mon coeur d'expérience professionnelle.

   Comme depuis le premier jour, le sommeil me gagne rapidement et je m'endors ce soir sans même parvenir finir ma lecture.

 

photos/diaporama de l'étape

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